À la recherche de la religion des origines

Avec les grandes découvertes, l'Europe découvre l'existence de peuples dits "primitifs". Au XIXe siècle, la vision de ces hommes "premiers" incite les anthropologues à étudier leurs religions afin de déterminer quelle fut la religion originelle de l'humanité. Genèse d'une recherche.


L'étude des peuples " primitifs " a eu pour visée de retrouver dans leurs croyances ce qu'étaient les croyances primitives et originelles, de l'humanité. Au XIXe siècle, la théorie évolutionniste et la constatation de l'évolution humaine entraînent l'anthropologie à considérer l'évolution de la pensée humaine sur le même schéma. Les frères Grimm pensent que les croyances aux lutins, fées...remontent aux origines de l'humanité.

John Lubbock (1834 ;1913) est le premier à essayer de calquer à la théorie évolutionniste l'évolution de la pensée humaine. Hypothèse qu'alors l'homme n'a pas de pensée définie sur dieu, la théorie d'un Dieu créateur est le résultat d'une longue évolution de la pensée humaine. Le point de départ étant l'athéisme (dans le sens qu'il n'y a pas d'idée de dieu) puis l'homme aurait progressé, passé d'étape en étape : fétichisme -> totémisme-> chamanisme-> idolâtrie-> monothéisme. Dans le monothéisme, il considère que le Dieu créateur n'a plus d'esprit mais est devenu une conception humaine si subtile qu'il en est devenu innommable et indéfinissable.

Tylor rejette cette théorie pour avancer sa théorie de l'animisme : l'idée d'un double ou fantôme, la perception de ce double est faite lors d'expériences extatiques, de transes ou de phases oniriques. Les âmes des morts sont considérées comme soit mauvaises, soit bénéfiques. Cette idée aurait entraîné l'installation d'un culte des ancêtres pour les apaiser. Les maladies et possessions sont expliquées par l'action d'esprits malins. Aux origines de l'humanité, les hommes ont développé une perception de leur monde donnant une âme, un esprit à toute chose = l'animisme.

Herbert Spencer va plus loin : il affirme que si les "sauvages" attribuent à toutes choses une âme et que les rites visent à calmer les ancêtres défunts, cela signifie que le culte des ancêtres est à l'origine de la religion : théorie du Mânisme.

Les théories de Lubbock et de Tylor sont un parallèle entre la psychologie infantile et la religion qui entraîne une critique et une dépréciation forte des religions. Elles eurent beaucoup de succès au XIXe siècle. Elles furent ensuites confrontées dans le but d'élaborer une théorie générale, puis remise en cause par Lang. En effet, celui-ci avait constaté que chez les peuples d'Australie et d'Amérique du Nord, il n'existe pas de croyance en des génies de la nature, ni de culte des ancêtres. On ne peut donc pas généraliser pour en tirer une théorie générale.
Toutes ces théories vont être remises en cause, surtout par Emile Durkheim (1858 ;1917) : sa propre théorie est basée sur l'étude d'Indiens d'Amérique, les Ojibway, qui ont comme type de croyance le totémisme. Le totem est une classe d'objet dont un clan ou une famille porte le nom et que ce ou cette dernière traite avec égard. Cette croyance ancestrale va conduire les anthropologistes à la considérer comme l'origine de la pensée religieuse. Mais le fait de constater que cela n'apparaît qu'en Amérique du Nord et en Australie entraîne la réfutation de cette théorie. Le totémisme n'est pas une étape nécessaire.
Frazer avouera que le totémisme n'a finalement rien de religieux car l'homme est à pied d'égalité avec son totem.

L'anthropologie s'est érigée en discipline académique à la fin du XIXe siècle, et a longtemps tâtonné. Cependant, elle a permis de porter un nouveau regard sur des religions connues alors surtout par des sources textuelles. Sa méthode d'investigation reposant sur l'évolution de l'humanité est avant tout comparative (les européens considèrent leur civilisation comme l'aboutissement -> les peuples "sauvages" permettent de voir l'évolution de l'état primitif de notre civilisation actuelle). A travers ce comparatisme, les anthropologues ont tenté de classer les étapes du religieux. Mais la méthode comparative est un piège pour la discipline car s'ils accumulaient des données sur des peuples, ils ont toutefois eu tort de les traiter avec égalité, sans tenir compte de la culture et du contexte.

1934 : Rose Benedict ira même jusqu'à traiter l'œuvre de Frazer d'œuvre anthropologique du monstre de Frankenstein. Cette méthode sera d'autant plus critiquée car elle vise l'impossible : l'universalité des lois de la civilisation humaine dans son ensemble

A suivre...

 
 
~jamesB~
Publié le : 09/04/2006

 

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