Le Brouillon

Pourquoi l'homme a-t-il tendance à s'autodétruire ?

Autolyse, suicide.

Idéation suicidaire : idée que se fait un individu selon laquelle le suicide pourrait constituer une solution à la situation dans laquelle il se trouve et qu'il juge insupportable ou bien à la douleur morale et à la détresse qu'il éprouve.

Ici, on ne parle pas seulement de suicide. Mais de destruction de l'âme. De récréer en nous et autour de nous une situation critique, qui aboutit à la solitude, à la douleur, et dans certains cas, à la mort.

Le suicide n'est qu'une des possibilités d'autodestruction de l'homme.

L'homme semble avoir du mal à accepter le bonheur. Il ne se sent bien que dans le connu. L'inconnu, justement, gagne une dimension terrifiante d'incertitudes, fait peur, et empêche d'y faire face.
Néanmoins, il existe une inconnue auquel chaque chose vivante est un jour confrontée. La grande inconnue, la mort.

Je me demandais pourquoi certaines personnes riaient quand on leur demandait : " Pourquoi tu fumes ? Cela va te tuer ! "
Leur rire semble signifier " Peu importe, je ne risque rien, ou alors dans 30 ans " ou encore " Je ne dirais rien de mes inquiétudes devant vous. "

Néanmoins, je me suis dit que cela pouvait être parce que ces personnes ont la sensation de contrôler la seule chose qu'on ne peut contrôler. Notre propre mort. Ainsi, adopter des comportements pouvant entraîner la mort donne une sensation de contrôler sa vie, de pouvoir déterminer l'heure de sa mort, plutôt que de devoir attendre dans le doute et l'incertitude le moment prévu depuis que notre corps existe.
Evidemment, ce moment ultime n'existe pas. Il aurait fallu vivre loin de tout virus, de toute infection, de tout sentiment et de toute pulsion, à l'écart de tout ce qui nous ferait raccourcir notre temps de vie, et ce lieu non plus n'existe pas.

D'où l'incertitude de notre mort. D'où la peur de mourir. D'où l'envie de transcender cette peur, et de 'mourir avant' pour se jouer du sort des mortels qui nous est infligé.
Mais l'homme ne serait pas l'homme s'il n'était mortel. Nous ne sommes pas des dieux.

La mort fait partie d'un tout. La terre engloutit notre corps ( si l'on évite de placer notre dépouille dans un lieu loin de tout vers, dans un caveau scellé au béton, sans air, afin que notre corps n'apporte jamais rien à la terre, et que notre propre mort soit inutile. ) et apporte son concours au cycle de la vie.
Ceci est la peur virale, l'ultime, des hommes. Parce que nous craignons de perdre ce corps que nous contrôlons, auquel nous sommes infiniment lié dans notre être, et aussi par la perte de notre " esprit " , de notre volonté, de notre conscience.
Quand je pense à la mort, je pense au fait de perdre ceux que j'aime, à ce que j'aurai voulu faire et voir, mais je pense aussi à tout simplement exister. Être. Penser. Ce qui fait de moi une personne vivante, pas seulement un corps en état de marche.

Les humains n'ignorent pas ce qui arrive au corps. Ce n'est pas cette inconnue qui nous terrifie , donc. La perte de notre âme, de notre esprit, voilà ce qui est terrible. L'idée que le monde continue de vivre sans nous, et que nous, nous pourrions bien ne pas continuer à la voir vivre. C'est le trou noir, le vide, le néant, sans même la conscience de ce néant.
C'est comme si vous fermiez les yeux en oubliant que vous les fermez, en oubliant que vous ne voyez que du noir, en oubliant que vous oubliez tout. Et comme vous êtes vivants, cela ne suffira pas, car le corps n'accepte pas que l'esprit l'oublie. Vous êtes liés à votre corps.

Une fois le corps parti, qu'arrive-t-il à l'esprit alors ? Etant libre, s'évanouit-il dans l'air ?
S'arrête-t-il une fois que les connexions dans notre cerveau ne s'effectuent plus ? Quand s'effectue vraiment la perte de la conscience ? L'arrêt de nos pensées ?

Ce texte devient une thèse sur la mort et non plus sur le penchant destructeur de l'homme, alors je m'arrête là.
Néanmoins, cela était essentiel à la compréhension de ce qui fait de nous des humains.

De plus, je ne parle pas seulement de la mort.
Je parle de la destruction de notre propre vie.

Un homme qui connaît le bonheur l'assimile au plaisir, veut du manque, a besoin de souffrir pour bien savoir qu'il éprouvait du bonheur.
Car l'homme veut que ce qu'il n'a pas, et il ne prend conscience d'avoir une chose que quand il la perd. Ainsi la mort est différente. Car a-t-on seulement conscience de perdre la vie ? Le dernier souffle n'est-il qu'une réaction corporelle, ou bien est-ce, comme les anciens le disaient, l'expulsion de l'âme hors du corps ?



~Bartiméus~ le 10-07-2008 à 12:05
 

Très bon texte Bartiméus.
Je trouve que tu décris vraiment bien la mort et ses implications.

Ce que tu dis est valable de manière générale, mais pas pour tout le monde.
Il est parfaitement possible de se libérer de la peur de la mort sans pour autant avoir recours à des pulsions auto-destructrices. Comme tu le dis, la mort fait partie d'un tout, et est de toute façon inévitable. La redouter est donc parfaitement inutile.
Bien sûr, on ne sait pas ce qui arrive à notre esprit. L'inconnu peut faire peur, mais pas forcément. Pour ma part, c'est la curiosité qui prend le pas sur la crainte. D'une certaine manière, je suis "impatient" de voir ce qui se passera quand je mourrai.

Vraisemblablement, il ne se passera rien, et mon esprit se contentera de disparaître. Mais même ça, ce n'est pas un drame après tout. Puisque si la conscience disparaît, tout disparaît. On dit souvent qu'on ne veut pas mourir pour ne pas faire souffrir nos proches. Mais dès l'instant où on cesse d'exister, nos proches cessent également d'exister. C'est vrai, après tout il n'y a aucune manière de se prouver que la réalité continue d'exister quand on n'est pas là...

Sinon, je ne pense pas que le suicide soit uniquement "une solution à la situation dans laquelle l'homme se trouve et qu'il juge insupportable ou bien à la douleur morale et à la détresse qu'il éprouve". Le suicide peut avoir beaucoup d'autres raisons : par curiosité de voir ce qu'il y a derrière la mort (bon OK, faut vraiment être TRES curieux), par idéologie (les kamikazes, ou encore les moines qui s'immolent vif en guise de protestation)...

Et enfin, je ne suis pas très d'accord avec ton dernier paragraphe. Il est vrai qu'on ne peut connaître le plaisir qu'en connaissant la douleur.
Mais la mort a un rôle exactement similaire, pas différent. C'est une notion que l'on apprend en cours de philosophie : la seule chose que peuvent nous envier les dieux immortels est justement notre mort, car c'est le fait que notre vie soit éphémère qui lui donne tout son goût, tout son intérêt. En étant immortel, toutes les choses perdraient leur valeur.
Si le voyage est sans fin, il ne sert à rien d'avancer.



~RoN~ le 10-07-2008 à 14:30
 

J'avoue, Ron, que j'ai moins réfléchi sur le dernier paragraphe.
Tu as raison quand tu dis que l'intérêt de mourir est qu'on en savoure que plus la vie, et que nous sommes différents et enviés des dieux.
Néanmoins, il est dans la nature de l'homme de vouloir ressembler aux dieux, je pense, à vouloir être parfait, éternel, immortel, dans l'orgueil que l'on a à penser que le monde serait mieux avec nous que sans. Donc la mort est un obstacle à l'hégémonie humaine sur l'univers. ( Mais on se rattrape par notre tendance à vouloir multiplier l'espèce. )

Pour ce qui est du suicide, le suicidant ne pense qu'à cette alternative, et pas à une autre. Moi-même, je ne considère le suicide que comme une fuite. Evidemment, je ne peux englober tous les cas. Juste une généralité.
Et il n'y a pas que la mort comme auto-destruction. Briser son couple quasi-volontairement, s'empêcher de réussir dans sa vie professionnelle, etc...



~Bartiméus~ le 10-07-2008 à 17:47
 

Très bon article !
Je suis bien d'accord avec ta vision de la mort, et la raison des suicides est souvent pour fuir, pour en finir.
Après tout, "mieux vaut-il vivre dans la souffrance ou d'en finir avec ?"
Quand on voit ce monde de m*.. Mais bon, il y a toujours les quelques petits instants heureux qui motivent.

Pour la mort, je suis bien d'avis que notre conscience (et inconscience) s'arrête en même temps que notre corps.
Je ne vois la mort ni plus ni moins comme une nuit sans rêve, et sans fin.
Après tout, on s'endort, on se réveille. Qu'y a-t-il eu entre temps? Qu'a-t-on fait, pensé ? Aucune idée. Que du vide. C'est comme si on avait cessé de vivre pendant quelques heures..
Je ne pense pas que la mort soit différente de ça.

ps @ Ron : quand tu dis que "dès l'instant où on cesse d'exister, nos proches aussi"; je ne suis pas trop d'accord. Ce n'est pas parce qu'on n'a pas conscience de quelque chose que cette dernière n'existe pas.
La preuve, si tu perds un proche, celui-ci continuera toujours d'exister.(sauf dans le cas où il lui arriverait malheur aussi.. ).
Enfin je ne sais pas si tu l'entendais de cette manière, peut-être voulais tu dire que quand on cesse d'exister, nos proches aussi cessent d'exister dans notre conscience..

Enfin bon, très bon article Bartiméus !



~Thanatos~ le 11-07-2008 à 16:18
 

Pour expliciter ma pensée, on peut dire que dès l'instant de notre mort, l'univers dans son entier cesse d'exister. En effet, comme je l'ai dit, il n'existe aucun moyen de savoir si la réalité continue lorsque l'on est absent.
Aussi, pour ceux qui, comme moi, craignent avant tout la mort par peur de faire souffrir leurs proches, il suffit de se dire que l'univers n'existe que par rapport à vous, et que quand vous disparaitrez, il disparaitra également. C'est carrément égocentrique, d'accord, mais plutot réconfortant et, après tout, pas du tout illogique.
Je crois que pour qu'une chose puisse exister, il faut qu'elle soit perçue par une conscience. Aussi, si la conscience disparait, tout disparait.

Pour revenir à la question "mieux vaut-il vivre dans la souffrance ou d'en finir avec ?", je crois que dans une telle situation, il faut tout de même choisir la vie.
Selon la théorie la plus probable, l'âme - pardonnez moi, la conscience - disparait totalement au moment de la mort. Aussi, la mort n'est pas comme on pourrait le croire "la fin des souffrances".
En réalité, la mort est pire, bien pire que la plus atroce des souffrances, puisqu'elle consiste en la disparition pure et simple de l'esprit. Même en souffrant comme en enfer, vous restez vivant. Mieux : c'est justement en souffrant que l'on se sent le plus vivant.

Mais ce genre de décision dépend bien sûr de la personne concernée. Il est difficile de comprendre et d'adopter ce point de vue, et la plupart des gens souffrant d'une manière intolérable choisiront de mettre fin à leur jour, ce qui n'est absolument pas blâmable.



~RoN~ le 11-07-2008 à 19:08
 

( J'ai une autre théorie sur la mort que je posterais bientôt, une fois l'article en question envoyé pour la candidature de rédacteur du site, et on se rejoint un peu )

Je comprend parfaitement l'idée que, si tout l'univers tourne autour de nous, tout pourrait bien s'arrêter. Et en un sens, c'est vrai, puisque nous sommes l'acteur principal de notre propre vie.
Quand je mourrai, le rideau se baissera pour moi (mes paupières, en fait), et le monde disparaitra à jamais à ma conscience.
Si je n'ai conscience du monde, comment le monde pourrait-il exister ?

Néanmoins, cela signifie que je contrôle ce monde en entier. Que je m'inflige depuis toujours mes propres souffrances, mes épreuves, que je me donne mes joies et mes tristesses. Je tire les ficelles dans l'ombre, sans le savoir vraiment, et Dieu est mon nom.

Or... le hasard existe. Il y a des choses que je ne contrôle pas. Même dans mon existence proche.
Alors le monde ne tourne pas autour de moi. Je ne suis pas le créateur de tout ce que je vois ; et donc, quand je mourrai, le monde continuera d'exister.

En quelque sorte, contrairement à toi, Ron, penser que le monde continuera à ma mort me rassure.
Car quand il m'arrive des mauvaises choses, je vois le ciel au dessus de moi, je vois les humains s'agiter, et je me dis que tout cela continuera sans moi.
Le mieux que je puisse faire, c'est de laisser une marque de manière à ce que les gens se souviennent de moi. Ils vont forcément en souffrir, mais les humains sont tels qu'ils oublieront cette douleur, un jour. Tant qu'ils ne m'oublient pas.


Pour ce qui est du suicide, ce n'est ni une question sociale, ni de loi. On ne peut blamer un être voulant se suicider. Le mieux qu'on puisse faire, c'est de lui donner des raisons de vivre.



~Bartiméus~ le 11-07-2008 à 23:00
 

Bravo ! Bel article ! Peut-être devrais-tu plus le centrer sur la mort ? Et partir de là pour expliquer les tendances suicidaires des hommes.

Personnellement je ne pense pas que le suicide soit un acte raisonné. Cela serait plus un besoin de mettre fin à une souffrance physique ou morale qui nous empêche de penser à autre chose.

Quant aux kamikazes, s'ils se jetaient sur les porte-avions américains pendant la seconde guerre mondiale c'était surtout parce qu'ils n'avaient pas le choix... Mais peut-être parles-tu des djihadistes ?
Dans leur cas, je ne pense pas que ça soit un véritable suicide ; ils ne mettent pas fin à leurs jours, mais plutôt détruisent ce qu'on leur a désigné comme l'ennemi de Dieu. Ils se battent pour une cause qu'eux-mêmes ne comprennent pas vraiment. Mais ça, c'est de la politique pour affirmer le pouvoir d'une minorité d'extrémistes religieux.

Bref, ce n'est pas le sujet premier du débat. Personnellement j'aimerais ne pas avoir peur de la mort. Jeune, lorsque nous sommes en pleine possession de nos moyens c'est bien plus facile que lorsqu'on sera plus âgé, fatigué voire handicapé et victime de maladies chroniques. Seul notre esprit ne vieillit pas ; du moins c'est ce que je souhaite à tous. Rester un éternel enfant curieux de tout et insouciant, à la limite de la naïveté : peut-être est-ce une voie ? Il y en a tant !

Sinon, je terminerais en disant que moi, la mort je la regarde en face... mais de loin !



~Austin~ le 13-07-2008 à 10:51
 
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